L'interprétation des contenu implicites dans "Zazie dans le métro" de R. Queneau

Approche inférentielle


Thèse de Master, 2010

111 Pages


Extrait


Introduction

L’énonciation, qu’elle soit écrite ou orale, comporte un certain nombre de messages sous-jacents qui sont désignés sous le terme général de contenus implicites. Ce terme réfère au message qui s’oppose, dans un énoncé donné, au message explicite, littéral, par son statut problématique de non dit. Ce statut est bien exprimé par une question de Catherine Kerbrat-Orecchioni exposant un paradoxe :

«…Comment amener quelqu’un à penser quelque chose, si ce quelque chose n’est pas dit, et présent quelque part dans l’énoncé ? »[1]

Cette question préliminaire qui commente un constat de Grice : «parler explicitement, c’est “to tell something “ ; parler implicitement, c’est “to get someone to think something“ »[2] , a le mérite d’évoquer, d’une part, les modalités et les raisons de la production des contenus implicites par un locuteur dans un contexte donné et, d’autre part, le mécanisme de l’interprétation de ces contenus par l’allocutaire. Ce mécanisme est a priori, toujours selon Kerbrat-Orecchioni, simple à définir. Il s’agit, pour le sujet parlant, d’appliquer à un énoncé « ses diverses “compétences“ aux divers signifiants inscrits dans la séquence, de manière à en extraire des signifiés. » [3] . Mais dès qu’on passe au stade pratique, dès qu’il s’agit de « préciser la nature des opérations interprétatives concrètement effectuées, il n’est bien sûr plus question de simplicité, mais d’un mécanisme d’une complexité extrême, dans lequel interviennent conjointement des compétences hétérogènes… ». Ces compétences hétérogènes subsument quatre types différents, le savoir encyclopédique, la compétence logique, la compétence rhétorico-pragmatique et la compétence linguistique, qui sont, eux-mêmes, composés de plusieurs éléments hétéroclites.

Dans notre étude, nous focaliserons essentiellement sur la complexité de cette question en étudiant l’interprétation des contenus implicites dans Zazie dans le métro[4] , roman de Raymond Queneau, à travers une approche inférentielle. Le choix de ce corpus nous a été dicté pour deux raisons principales.

La première est que ce roman s’apparente plus à un texte théâtral puisqu’il est constitué de longs échanges entre les personnages qui se développent parfois sur plusieurs pages sans aucune intervention du narrateur. Ceci implique la réduction de l’intrigue à une grande simplicité diégétique : Zazie, provinciale qui visite pour la première fois Paris, le temps d’un week-end, veut impérativement monter dans le métro mais ceci est impossible puisqu’une grève a arrêté la circulation de ce moyen de transport.

L’abondance des dialogues est une constante dans les romans de Queneau. Nous donnerons pour exemple son roman : Le Vol d’Icare, dont la forme est celle d’une pièce de théâtre. Si nous étudions minutieusement l’énonciation dans notre roman de référence , nous voyons que le dialogue entre les personnages est la forme la plus utilisée dans le texte. Il s’étend parfois sur plusieurs pages ponctuées par de courtes didascalies comme (Geste) ou (Silence) , insérées entre parenthèses. Les dialogues sont intéressants à étudier parce que la présence du non dit y est plus pertinente que celle du dit.

Dans notre corpus, les échanges verbaux sont caractérisés par une grande liberté de ton puisque les dialogues sont construits par des personnages venant d’un milieu populaire : la classe populaire parisienne des années 1950. Cette liberté de ton s’apparente à ce que Kerbrat-Orecchioni appelle les « productions orales authentiques », c'est-à-dire les conversations orales telles qu’elles se pratiquent dans la vie courante. Selon cette linguiste, l’approche interactionnelle du discours doit donner la priorité à l’étude du fonctionnement oral de la langue qui est beaucoup plus riche :

« Le travail descriptif effectué à partir de conversations enregistrées fait apparaitre combien l’organisation de cette “terra incognita“ diffère de celle du continent mieux exploré des pratiques scripturales »[5]

Il faut noter, par ailleurs, que ces conversations, à travers leur aspect mimétique, adoptent, dans la plupart des cas, la forme du parler populaire. Elle renvoie, d’ailleurs, dans : Les Interactions verbales, à un texte qu’elle qualifie de « remarquablement lucide »[6] de Queneau, extrait d’un ouvrage intitulé : Bâtons, chiffres et lettres[7] , dans lequel il cite cette déclaration d’Alejo Carpentier qui est en parfaite adéquation avec son projet littéraire :

« Je suis de plus en plus convaincu que le dialogue, tel qu’il s’écrit dans les romans et les pièces de théâtre, ne correspond nullement à la mécanique du vrai langage parlé. »[8]

Les énonciateurs profitent du caractère paradoxal de l’implicite, message à la fois absent et présent du discours, pour produire certaines ambigüités dans des buts stratégiques divers. Nous nous référons, dans ce cadre, essentiellement à un ouvrage de Catherine Fuchs consacré à l’analyse des ambiguïtés du français[9].

La deuxième raison est que notre roman est riche en déviances sémantiques et morphologiques qui nous intéressent sur le plan de la réception. L’écriture de Queneau dans Zazie dans le métro, est marquée par deux mouvement littéraires majeurs : le surréalisme et l’OuLiPo[10]. Malgré le fait que Queneau ait rompu formellement depuis les années trente avec le mouvement surréaliste et son principe d’écriture automatique qu’il n’a cessé de dénoncer, on peut trouver chez lui dans Zazie dans le métro certaines caractéristiques de la poétique de ce mouvement[11]. Il nous semble que l’aspect réflexif et novateur du langage dans notre corpus est catalysé par la présence surréaliste de ce regard neuf que pose l’enfant Zazie, personnage dont le statut est complexe et majeur dans le roman, sur les relations entre les individus dans la société et sur les différents modes d’interactions verbales. Du surréalisme, il hérite la figure de l’enfant qui s’introduit dans le monde des adultes pour remettre en question leur langage et les inciter à le découvrir à travers une vision critique révélée au moyen du caractère métalinguistique qu’elle développe dans ses énoncés. En effet, un regard idéologique et historique est porté sur le langage des adultes parmi lesquels elle évolue. Pour ce qui est de l’OuLiPo, on trouve les germes d’une écriture expérimentale, aussi bien au niveau énonciatif qu’au niveau morpho-syntaxique.

Toutes ces innovations confrontent le lecteur implicitement à un vrai travail d’interprétation et de reconstitution morpho-syntaxique. Le système inférentiel du lecteur de l’œuvre romanesque fut traité par Umberto Eco dans : Lector in fabula[12], ouvrage qui s’intéresse à l’implicite dans le cadre du système complexe de l’énonciation romanesque et dont nous adopterons certains points de vue dans notre analyse.

Il faut rappeler que les recherches linguistiques sur ce sujet furent déjà amorcées par Emile Benveniste qui est considéré comme le fondateur de la pragmatique énonciative. Dans Problèmes de linguistique générale, il déclare :

«L’énonciation écrite […] se meut sur deux plans ; l’écrivain s’énonce en écrivant et, à l’intérieur de son écriture, il fait s’énoncer des individus. De longues perspectives s’ouvrent à l’analyse des formes complexes du discours, à partir du cadre formel esquissé ici. » [13]

Nous avons vu que l’implicite est un contenu, dans la communication verbale, dont le sens se trouve caché dans l’énoncé et qui requiert, au niveau du récepteur, un travail d’interprétation beaucoup plus élaboré que les contenus explicites. Cette interprétation se fait en vertu d’un processus appelé inférence qui est la combinaison de plusieurs compétences du sujet parlant, car interpréter « un énoncé émis par un locuteur, c’est être capable d’accéder à un ensemble d’hypothèses intentionnelles qui motivent et expliquent l’acte d’émission verbal. »[14] . L’inférence peut être nécessaire, c'est-à-dire seulement liée à l’aspect sémantique et lexical d’un énoncé, comme elle peut être possible, c'est-à-dire dépendante du contexte énonciatif. Mokhtar Sahnoun évoque la difficulté d’analyse de ce deuxième type d’inférence dont la dépendance au contexte lui confère « un fonctionnement aléatoire, imprévisible dont l’analyse peut difficilement déterminer les principes et dont elle ne peut définir les paramètres. ». Il constate néanmoins que :

« La prise en compte des considérations théoriques et des conclusions auxquelles ont abouti les réflexions sur les inférences nécessaires et les inférences possibles […] oriente vers l’option qui consiste à faire intervenir les principes qui relèvent de l’un et l’autre type d’inférence pour décrire et analyser les vocables inscrits dans des phrases ; car la jonction des différents critères spécifiques aux processus inférentiels permet de décrypter les différents sens situés à des niveaux hiérarchisés du discours, explicites et implicites. »[15]

Puisque les dialogues sont multiples et variés dans notre corpus, il est évident que nous aurons l’occasion d’analyser des occurrences qui font partie de ces deux types d’inférence. La problématique qui se pose alors est celle-ci :

Comment la poétique de Queneau exploite-elle la dimension implicitée du discours afin de construire une œuvre où le non-dit est aussi esthétiquement pertinent que le dit ?

Pour décrire la complexité des phénomènes interprétatifs dans l’énonciation, la pragmatique s’impose. C’est une discipline qui s’inscrit dans une dimension plus large qu’est la sémiotique, science qui s’intéresse à tous les signes de la communication. Les linguistes qui l’adoptèrent, dont le premier représentant fut le logicien Charles William Morris dans les années 1930, héritier du concept du triangle sémiotique[16] de Charles Sanders Peirce dont les trois corrélats sont l’objet, le signe et l’interprétant, ont considéré l’étude du langage comme indissociable de la parole, c'est-à-dire de l’utilisation du langage par des locuteurs dans un contexte. Elle analyse les effets que peuvent produire les signes sur leurs utilisateurs. Cette conception du langage fait qu’il est étudié dans le cadre du contexte de l’énonciation où la parole est un ensemble d’actes qui modifient une situation énonciative donnée. Rompant avec l’immanentisme de Saussure, la théorie des actes de langage développée par J.L Austin et continuée par John Searle considère, en effet, que le langage est utilisé pour agir. John Searle expose, dans ce cadre, cinq différentes modalités d’action par la parole : les assertifs, les directifs, les promissifs, les expressifs et les déclaratifs[17].

Mais l’étude pragmatique nécessite aussi que le sujet qui décode le discours accorde un intérêt quant au sens et à la structure des énoncés, autrement dit, aux données sémantiques et syntaxiques, car, comme le note François Armengaud :

« Il faut savoir quelle est la relation des signes entre eux et des signes aux choses pour envisager la relation des signes aux interprètes. » [18]

Ceci veut dire que la pragmatique est une méthode qui articule plusieurs savoirs linguistiques. Sa nature multidisciplinaire nous permet d’appréhender la complexité de la question de l’interprétation des contenus implicites. C’est dans ce sens que nous pouvons lire cette citation de Denis Vernant :

« Loin de constituer la ritournelle facile des beau discours académiques, l’approche pluridisciplinaire s’avère aujourd’hui une nécessité résultant de l’état de développement des différentes disciplines et la complexité intrinsèque des objets de recherche. »

Il est patent que dans une telle étude, certains obstacles méthodologiques apparaissent d’emblée. La base théorique qui structure un tel projet peut contenir certaines difficultés dans l’application pratique, c'est-à-dire dans l’analyse directe du corpus. En effet, il nous faudra constamment veiller, pour analyser les inférences dans un texte littéraire, à éviter les appréciations hâtives et l’imprécision et à manipuler rationnellement des notions théoriques irréductibles à la schématisation. Il faut dire que la notion d’inférence est considérée par J. Jayez, comme épistémologiquement génératrice d’ « hésitaion » à cause de « la multiplicité des domaines du savoir où le terme est utilisé : philosophie, psychologie, intelligence artificielle, logique, linguistique. »[19]. Nous avons constaté que la pragmatique, appliquée au texte littéraire, a dû faire face à plusieurs difficultés épistémologiques. Si l’on prenait l’exemple du roman, nous verrions qu’il est un support totalement décontextualisé par le simple fait qu’il est construit sur un décalage entre l’émission du message par l’auteur et sa réception par le lecteur. Or la pragmatique étudie la force immédiate de la parole. Les actes de langages, par exemple, sont, selon les théoriciens de la pragmatique, des actes de parole qui produisent des changements directs sur les interlocuteurs dans une interaction donnée. Pour Martine Bracops, dans son ouvrage Introduction à la pragmatique[20] , il y a trois notions clés qui peuvent définir cette discipline :

«La notion d’acte car le langage est action en ce sens qu’il permet d’instaurer un sens mais aussi d’agir sur le monde et sur autrui. La notion de contexte, car l’interprétation du langage ne saurait faire abstraction de la situation concrète dans laquelle les propos sont émis et la notion de désambiguisation car certaines informations extalinguistiques sont indispensables à la compréhension sans équivoque d’une phrase.»

Ces trois notions sont foncièrement liées à l’inférence puisqu’ils nécessitent des compétences interprétatives multiples et variées. En vertu de sa nature multidisciplinaire combinant syntaxe, sémantique et logique, la pragmatique nous a semblé être une méthodologie opérationnelle pour traiter le problème de l’inférence dans un texte romanesque. En effet, l’étude des processus inférentiels qui viennent se superposer au code pour livrer une interprétation complète relève essentiellement de la pragmatique.

Pour mieux pratiquer la pragmatique sur un texte romanesque, nous nous basons sur les travaux de Jean-Michel Adam et de Dominique Maingueneau en matière de pragmatique textuelle.

C’est dans cette perspective méthodologique que nous démontrerons, dans un premier temps, que la communication dans notre corpus contient des “pièges“. Ce terme est, pour nous, une notion clé pour la définition de la conception quenienne de la conversation. L’idée de piéger quelqu’un par la parole revient de façon constante, non seulement dans Zazie dans le métro, mais aussi dans tous les romans de Queneau comme une métaphore filée. Cet acte est par définition un mode d’agir sur l’autre afin de le tenir en échec. Aussi l’approche interactionnelle de la communication nous sera-t-elle utile afin d’explorer les manifestations et les enjeux de la présence de cette caractéristique dans les dialogues.

Notre analyse s’appuie sur les points de vue de Kerbrat-Orecchioni qui a étudié l’implicite dans la communication, tant dans son ouvrage intitulé L’implicite[21], que dans celui intitulé La Connotation[22] ou encore dans Les Interactions verbales[23]. Le domaine de l’interaction qui se spécialise dans les échanges conversationnels fut son sujet d’étude dans deux ouvrages éclairants : Les Interactions verbales et Le Discours en interaction. Selon cette linguiste, une conception interactive de la communication doit prendre en considération le fait que :

« Les phases d’émission et de réception sont en relation de détermination mutuelle : la réception est bien évidemment commandée par l’émission (les opération interprétatives s’effectuent à partir du signifiant produit par l’émetteur, et plus ou moins bien transmis par le canal ; ainsi que sur la base d’un certain nombre d’hypothèses concernant les opérations d’encodage et les intentions supposées de l’émetteur) mais aussi l’émission est aussi commandée par la réception ou ce qu’en suppose du moins l’émetteur… »[24]

Nous lui emprunterons, d’autre part, le concept du « contre-sens interprétatif » développé dans son ouvrage L’implicite pour mettre en évidence certains traits qui nous permettront de mieux comprendre les mécanismes discursifs dans Zazie dans le métro et partant, le sens de cette œuvre qui n’est pas la mieux comprise parmi celles de Queneau. Car il faut dire que les contre-sens, qui sont généralement pris pour de simples effets provoquant le rire, contiennent une vraie profondeur littéraire et ontologique lorsqu’ils sont étudiés d’un point de vue inférentiel.

Pour l’aspect logique de certains processus interprétatifs, nous nous référons aux travaux d’Oswald Ducrot. Ses études sur l’opposition entre les contenus posés et les contenus présupposés dans les énoncés, notamment dans La Preuve et le dire[25] , nous seront indispensables pour aborder certains contenus implicites. Nous nous bornerons dans cette partie à étudier ces problèmes exclusivement autour de la notion de l’interprétation dans la communication verbale en ignorant le para-texte, c'est-à-dire les signes mimo-gestuels et corporo-visuels qui existent sur un autre plan de la communication.

Nous étudierons, dans un deuxième temps, le métalangage dans le corpus puisqu’il est un élément réflexif important dans l’écriture de Queneau et qu’il est foncièrement lié à l’implicite. Nous montrerons comment ce métalangage, en tant qu’outil réflexif sur la parole, peut s’organiser au niveau des différentes strates de l’énonciation :

-le métalangage explicite entre les différents personnages : nous nous référerons, dans cette partie, à une réflexion théorique fondamentale dans ce domaine qui est Le Métalangage[26].

-le métalangage dans l’interprétation de l’œuvre par le récepteur : il existe dans le corpus toute une poétique du métalittéraire, des néologismes et des écarts de langage.

Dans une troisième partie, nous analyserons les interactions verbales intégrées dans le roman, dans le cadre de la polyphonie. En effet, Umberto Eco déclare, à propos de la pragmatique du texte, que cette discipline aborde :

« … l’aspect de l’activité coopérative qui amène le destinataire à tirer du texte ce que le texte ne dit pas mais qu’il présuppose, promet, implique ou implicite, à remplir les espaces vides, à relier ce qu’il y a dans ce texte au reste de l’intertextualité d’où il nait et où il ira se fondre. » [27]

La théorie de la polyphonie, dont Mikhaïl Bakhtine est le précurseur, s’intéresse au fait que l’énonciation, même s’il elle n’est pas étudiée dans le cadre de la conversation, est intrinsèquement interactive puisqu’elle est une reprise de mots, d’expressions, de citations qui préexistent. C’est aussi ce qu’a affirmé Dominique Maingueneau, à la suite de Bakhtine :

« Toute énonciation, même produite sans la présence d’un destinataire, est en fait prise dans une interactivité constitutive (on parle de dialogisme), elle est un échange explicite ou implicite, avec d’autres énonciateurs, virtuels ou réels, elle suppose toujours la présence d’une autre instance d’énonciation à laquelle s’adresse l’énonciateur et par rapport à laquelle il construit son propre discours. Dans cette perspective, la conversation n’est pas considérée comme le discours par excellence, mais seulement comme un des modes de manifestation- même s’il est sans nul doute le plus important- de l’interactivité foncière du discours. » [28]

Nous verrons que la polyphonie dans Zazie dans le métro est présente à travers des procédés qui :

-font parler un seul locuteur plusieurs langues à travers l’intertextualité, la multiplicité des registres et des idiolectes.

-font dire à plusieurs locuteurs un seul énoncé à travers la répétition polyphonique et l’intratextualité.

Outre Zazie dans le métro qui constituera donc notre corpus de référence, nous nous référons à six autres romans de Queneau qui sont Le Chiendent[29] , Gueule de pierre[30] , Pierrot mon ami[31], Exercices de style[32] , Les Fleurs bleues[33] et Le Vol d’Icare lorsque nous y trouvons des occurrences qui présentent une analogie avec celles qui figurent dans notre corpus de référence. Nous utilisons, également, son ouvrage éclairant composé d’articles, Bâtons, chiffres et lettres, pour mieux comprendre les préoccupations linguistiques qui sont à l’origine de sa création littéraire et du type d’écriture qu’il a adopté.

Cette étude est une étape formatrice dans notre parcours de recherche dans le sens où les différents ouvrages consultés dans la bibliographie nous ont permis de constituer un background intéressant. Ce background nous a permis non seulement de constater que la manipulation des concepts linguistiques doit s’effectuer en prenant en compte les variations des définitions, selon les chercheurs et les écoles auxquelles ils appartiennent mais aussi d’avoir comme perspective un travail plus ample et détaillé sur un corpus qui pourra être plus consistant. En effet, la présente étude constituera une base méthodologique pour un travail de thèse sur un corpus comportant plusieurs ouvrages de Raymond Queneau ou d’un autre auteur éventuellement.

I. Interaction verbale et “piège“ de la communication

Nous empruntons l'expression "piège" à une réplique inscrite dans le roman, énoncée par le narrateur dans une proposition incise qui commente une réponse faite par Gabriel à Zazie :

«-Eh bien, toi, bien sûr, répondit Gabriel tombant dans le piège. »

(p.23)

Nous tenterons de démontrer, dans cette partie, que la communication dans le roman est liée à plusieurs processus inférentiels qui véhiculent une certaine violence entre les différents personnages et dans leurs rapports sociaux. En effet lorsque nous cherchons la signification de ce terme dans Le Petit Robert nous trouvons ceci :

« Artifice qu’on emploie pour mettre quelqu’un dans une situation périlleuse ou désavantageuse, danger caché où l’on risque de tomber par ignorance ou par imprudence. » [34]

Le piège est donc une difficulté insidieuse, intrinsèquement lié à l’agression d’autant plus que ce terme se trouve défini dans sa signification linguistique par le sémiologue Louis Marin de la façon suivante :

« Pièges du discours : soit procédés rhétoriques, opérations argumentatives, tactiques dialogiques visant à persuader l'autre, à manipuler l'auditeur, à le réduire au silence ou à le faire croire. »[35]

1- Le contresens de mauvaise foi

L’interprétation du discours par les interlocuteurs du roman de Queneau, trahit chez eux, le plus souvent, ce que Catherine Kerbrat-Orecchioni appelle « le contre-sens de mauvaise foi » ; car ils font exprès de se tromper d’interprétation et de faire croire qu’ils sont incapables de décoder correctement certains énoncés : ce genre de contresens, subsumé dans les différents types de « dissymétrie encodage/décodage », s’effectue lorsque « A est conscient que S’ = S. Mais A veut faire entendre qu’il a vraiment extrait S (pour différentes raisons stratégiques et intérêts argumentatifs) »[36] .

1.1. Les pièges discursifs mis en œuvre par Zazie

Dans la séquence suivante :

-Alors petite, qu’il dit comme ça, comme ça on va se coucher ?
-Qui ça « on » ? demanda-t-elle.
-Eh bien, toi, bien sûr, répondit Gabriel tombant dans le piège.

(p.23)

L’énoncé de modalité interrogative formulé par Gabriel a une valeur illocutoire qui équivaut à une injonction implicite, sous-entendue: « Va te coucher ». Zazie exploite l’ambiguïté de l’emploi du pronom indéfini « on » générée par sa polysémie ; ce morphème, ainsi que le précisent les auteurs de la Grammaire Méthodique du Français[37]:

« vérifie pleinement sa définition dans les mots croisés : “ un vague sujet “. Sa valeur de base est, en effet, celle d’un pronom indéfini renvoyant à une personne ou à un ensemble de personnes d’extension variable que le locuteur ne peut ou ne veut pas identifier de façon précise. »

Stylistiquement, il s’agit d’une énallage, et plus précisément, selon la taxinomie de Pierre Fontanier, une énallage de personne[38]. C’est l’utilisation d’une forme grammaticale à la place d’une autre attendue. A cet emploi déviant du pronom « on », Queneau fait allusion dans l’un de ses autres romans, Le Chiendent :

« On apporte des nouilles. On, c’est la femme »[39]

Zazie feint ne pas savoir décoder cette figure stylistique et renvoie le « on » à son ambigüité problématique. Une ambigüité qui relève tant de l’interprétation du contenu linguistique, sémantique que du contenu empirique, qui relève du contexte énonciatif et qui s’articule à la question de la détermination de l’identité et de l’altérité ; mais aussi du rapport à l’autre. La mauvaise foi se révèle être, dans cette perspective, l’outil principal de Zazie pour déstabiliser ses allocutaires. Elle est une enfant de douze ans, rebelle et impertinente, qui ne veut jamais se soumettre à l’autorité des adultes. Cette attitude se manifeste dans les exemples que nous étudierons, trahissant chez elle une maîtrise du langage malgré la pseudo-naïveté qu’elle cherche à afficher de manière ostentatoire. Le questionnement, qu’elle formule dans cet énoncé à caractère métalinguistique, trahit sa sensibilité linguistique et la portée du regard qu’elle pose sur le fonctionnement de la langue :

« -Pourquoi qu’on dit des choses et pas d’autres ? » (p.87)

D’autant plus que personne ne peut lui livrer de réponses à ces questions métalinguistiques relatives à la fonction de la parole car tous les personnages ne veulent pratiquer aucun travail intellectuel ou analytique sur ce sujet. Lorsqu’elle harcèle Charles de questions sur la fonction de la parole, celui-ci refuse tout débat métalinguistique :

«-Tu me fatigues les méninges. C’est pas des questions tout ça.
- Si c’est des questions. Seulement c’est des questions auxquelles vous savez pas répondre. » (Zazie) (p.88)

Roland Barthes dira d’elle qu’elle est :

« vraiment un personnage utopique, dans la mesure où elle représente, elle, un anti-langage triomphant : personne ne lui répond. Mais par là même, Zazie est hors de l’humanité (le personnage développe un certain malaise) elle n’est en rien une petite fille, sa jeunesse est plutôt une forme d’abstraction qui lui permet de juger tout langage sans avoir à masquer sa propre psyché. »[40]

Il faut dire que dès sa première apparition, Zazie montre l’enjeu principal de sa présence : piéger ses interlocuteurs par la parole. Sa mauvaise foi est généralement liée à une question qui l’intrigue et la taraude et qui, de ce fait, est récurrente dans tout le roman, celle relative à l'identité sexuelle de son oncle Gabriel ou des gens qui l'entourent. A partir cette question nodale, elle cherchera à déstabiliser ses interlocuteurs afin que leur discours les trahisse. Nous remarquons cela, d’emblée, à partir du tout premier échange de Zazie dans le roman :

« - Chsuis Zazie, J parie que tu es mon tonton Gabriel.
-C’est bien moi, répond Gabriel en anoblissant son ton. Oui, je

suis ton tonton. » (p.11)

Pour donner une confirmation à « j parie que tu es mon tonton », Gabriel effectue une homophonie involontaire qui confère à sa réplique une redondance comique. L’adjectif possessif « ton » combiné avec la formation à redoublement « tonton » produit une séquence phonique cacophonique à trois syllabes identiques qui se suivent. Son discours devient semblable à un bégaiement ou à une prononciation enfantine parce que les enfants ont tendance à répéter les mêmes sons dans un mot pour faciliter la prononciation comme dans l’exemple de « cheveux » prononcé « veuveu »[41]. Bernard Dupriez[42] appelle ce phénomène « paréchème». Ce terme signifie un défaut de langage consistant à « placer à coté de l'autre des syllabes de même son ». Il donne en exemple ces séquences “Donica castra“ et “Il faut qu'entre nous nous nous nourissions“. Ce phénomène est selon lui « une variété de cacophonie » et l’aspect maladroit de la cacophonie, lorsqu’elle est involontaire dans l’élocution, produit le comique. Mais lorsqu’elle est voulue, elle peut être un procédé stylistique. Malgré sa syntaxe correcte, la réplique de Gabriel prend un tour comique qui dégrade Gabriel et le prive de son statut d’adulte par une régression soudaine et, par ailleurs, inverse les rapports, l’enfant adopte le rôle de l’adulte et l’adulte se trouve infantilisé.

Zazie a les compétences suffisantes pour identifier les signifiés variés de certains vocables polysémiques et cette maîtrise lui permet d’adopter une attitude ironique quant à certains emplois de ces vocables dans des contextes énonciatifs particuliers où elle cherche à déstabiliser son interlocuteur.

Lorsque Charles, irrité par ses accusations d’homosexualité, lui pose cette question pour se disculper :

« -Est-ce que j’ai l’air d’une pédale ? »

Zazie répond :

« -Non pisque vzêtes chauffeur. » (p.86)

La logique interprétative adoptée par Zazie semble être d’ordre déductif. Le chauffeur étant celui qui conduit la voiture, en l’occurrence, le taxi, il y a une relation logique contrainte entre le statut socioprofessionnel et le statut sexuel dans l’esprit de Zazie. Cette relation logique évidente est présupposée par le morphème « puisque »: « Vous êtes un chauffeur de voiture donc vous ne pouvez pas être une pédale ». Robert Martin apporte la précision suivante relative à l’emploi du morphème puisque:

« La cause introduite par puisque appartient en effet aux présupposés de la phrase. Il semble même que la cause soit présentée comme un fait déjà connu du locuteur, ne faisant donc pas partie, en tant que telle, de l’information. » [43]

Dans le dictionnaire Le Robert Historique[44] , le substantif pédale est polysémique. Il désigne à l’origine « un dispositif actionné par le pied, pièce qu’on meut avec le pied pour actionner une machine » puis il a désigné argotiquement, à partir de 1929, « un homosexuel par jeu sur l’initiale de pédéraste ». Charles emploie ce substantif, en tant que vocable appartenant à la langue argotique pour se disculper, alors que Zazie feint de comprendre le premier sens. Il est bien entendu qu’en tant que chauffeur, il s’inscrit plutôt dans la classe des [Humains] et de ce fait il ne peut appartenir à la classe des [Objets], par exemple une pédale, une composante de la voiture. La pseudo-argumentation qu’elle développe, qui relève plus de l’aporie que de la logique, trahit son ironie et, par ailleurs, qu’elle exploite la valeur polysémique du vocable pédale.

L’exploitation de la polysémie devient, d’ailleurs, un procédé essentiel dans sa rhétorique, comme si la signification se transformait en piège :

« -Je me demande ce que ces cons-là peuvent bien y connaitre, dit Zazie en baillant.

-… Voilà qui semble friser l’injure.

- C’est pas une frisure, dit Zazie mollement, c’est une permanente. »

(p.172)

Le sens de friser, sélectionné par le locuteur, est : frôler, raser et approcher de très près. Le sens interprété par Zazie est celui lié à la coiffure : mettre les cheveux en boucles fines et serrées. Ce décodage de l’acception inappropriée par mauvaise foi est véhiculé par l’inadéquation du signifié sélectionné au contexte particulier dans lequel le vocable « friser » est employé. Le verbe peut éventuellement être employé dans un contexte orienté sémantiquement vers la coiffure ; mais dans cet énoncé et dans ce contexte énonciatif précis, le signifié à sélectionner exclusivement se rapporte à une appréciation du mode de dire. En effet, le terme « cons », employé par Zazie, est évalué par le locuteur, agent de police, comme relevant presque de l’injure, par euphémisme pour atténuer l’impact de cette expression employée par une enfant, alors qu’il s’agit bien d’une injure, d’un terme grossier. La mauvaise foi a ici comme but de ne pas prendre au sérieux les propos autoritaires et menaçants des policiers qui les interpellent. Elle causera d’ailleurs le rire libérateur contre l’autorité:

« …Gabriel et Gridoux s’esclaffaient… » (p.172)

Dans les deux exemples suivants, Zazie utilise la polysémie pour agresser ses interlocuteurs :

« - Alors tu vois. (Charles)

- Je vois rien du tout. » (Zazie) » (p86)

« - Je vois. (La veuve Mouaque)

- Elle voit quoi ? demanda Zazie aigrement. » (p107)

Le sens signifié par le verbe voir, ici, par Charles et la veuve Mouaque, est celui de concevoir, d’imaginer. Zazie, elle, feint d’interpréter l’intransitivité du verbe dans ces deux cas comme une partie manquante du discours. Elle montre qu’elle interprète le verbe dans son sens concret de percevoir par les yeux alors qu’il est utilisé dans son sens figuré.

Dans un nouvel effort pour multiplier les sens, Zazie joue sur le sens des expressions figées en faisant semblant de prendre le figuré pour du littéral dans les expressions dont la signification est lexicalisée :

« -Je vais quand même pas te faire un dessin. (Charles)

-Vous dessinez bien ? » (Zazie) (p.86)

La locution familière faire un dessin à quelqu’un utilisée par Charles pour éviter de parler à une petite fille d’un sujet aussi tabou que l’homosexualité est prise au sens littéral par Zazie. Au sens figuré, faire un dessin à quelqu’un veut dire : expliquer davantage quelque chose par le discours. Elle fait semblant d’interpréter l’expression dans son sens compositionnel[45], sens littéral de la représentation graphique avec toutes ses connotations sexuelles. En effet, Gaston Gross montre à travers l’exemple de l’expression « la moutarde lui monte au nez » que l’une des caractéristique du figement est « l’opacité sémantique », c'est-à-dire un sens qui diffère du sens ordinaire :

« Le sens “ordinaire“ des mots de cette phrase ne permet pas de conclure que la phrase dans son ensemble signifie que l’on parle d’une personne qui se fâche. Nous dirons que cette phrase n’a pas de lecture compositionnelle. » [46]

Cette ambiguïté génère le silence de Charles qui mettra un certain temps à comprendre la relation entre le contenu de son énoncé et celui de la réponse de Zazie :

« Charles se tournant d’un autre côté s’absorba dans la

contemplation des flèches de la Sainte-Clotilde … » (p.86)

L’intérêt de prendre en considération les contenus implicites dans le cadre des interactions verbales est incontestable. C’est ce que démontre Oswald Ducrot en affirmant que l’implicite est moins sujet à la contestation que l’explicite :

« Une seconde origine possible au besoin d’implicite tient au fait que toute affirmation implicitée devient, par cela même, un thème de discussions possibles. Tout ce qui est dit peut-être contredit. De sorte qu’on ne saurait annoncer une opinion ou un désir, sans les désigner du même coup aux objections éventuelles des interlocuteurs […] Il est donc nécessaire à toute croyance fondamentale, qu’il s’agisse d’une idéologie sociale ou d’un parti pris personnel, de trouver, si elle s’exprime, un moyen d’expression qui ne s’étale pas, qui n’en fasse pas un objet assignable et donc contestable. »[47]

Les pièges discursifs sont donc pour Zazie une façon de perturber les attitudes socialement codées, les conventions et les certitudes des adultes. Mais le recours au contresens de mauvaise foi, outre cette fonction ironique qui lui sert à provoquer le malaise selon l’expression de Barthes, permet aux autres personnages d’échapper à certaines situations délicates, voire menaçantes.

1.2. L’ambiguïté comme procédé

Les interlocuteurs utilisent, dans plusieurs occurrences, l’ambiguïté comme une stratégie discursive. Nous rappellerons l’origine du terme stratégie qui « vient de l’art de conduire les opérations d’une armée sur un terrain d’action (il s’oppose alors à la tactique) au point qu’il a fini par désigner une partie de la science militaire et a pu faire l’objet d’un enseignement. »[48] . Cette origine peut nous renseigner sur l’aspect conflictuel de cette composante discursive. Le narrateur utilise d’ailleurs la métaphore de la guerre lorsqu’il évoque un personnage en train de préparer une réplique violente et défensive :

«C’était le moment de se forger quelque bouclier verbal » (p.10)

ou lorsqu’il parle d’un personnage incapable de se défendre quand il est agressé verbalement :

« La narquoiserie du ton devient presque offensante pour l’interlocuteur qui, d’ailleurs, s’empresse d’avouer sa défaite. » (p.15)

Et dans un autre roman, Le Chiendent, nous trouvons cette métaphore de la guerre employée par le narrateur pour décrire des conversations violentes :

« Il protesta. L’autre refusa la fermeture. Et de nouveau les “Meussieu“, les “Meussieu je vous dis“, les “mais Meussieu“ voltigèrent d’un bout à l’autre du compartiment, artillerie brenneuse et polie, boulets miteux et marmiteux que le lecteur de La Croix gobait au passage comme des œufs pourris. »[49]

« Entre Etienne. On met quelques instants à réaliser la situation ; lorsqu’elle est réalisée, l’attaque se déclenche. Etienne est cerné. »[50]

Le piège est une forme de stratégie non seulement parce qu’il signifie selon le Dictionnaire Historique de la Langue Française, « ruse, artifice pour tromper quelqu’un » mais aussi parce qu’il a signifié à l’origine, au sens propre « un dispositif destiné à capturer des animaux et, par analogie, des hommes ». Cette signification à trouvé son écho à partir du XXe siècle puisque le verbe piéger a développé une spécialisation concrète dans le domaine militaire.

1.2.1. Le script ignoré

Dans l’incipit on trouve cet échange :

« -Tu pues, eh gorille.

-Répète un peu voir, qu’il dit Gabriel.

-Répéter un peu quoi ? » (p10)

Gabriel ordonne au petit type de redire l’insulte qu’il avait proférée, avec le verbe répéter conjugué à l’impératif. Le petit type joue alors sur la valence[51] du verbe répéter que Gabriel a employé intransitivement avec ellipse du complément qui devrait être « ce que tu as dit ». Vu que les deux interlocuteurs n’ont jamais eu d’échanges ni verbaux ni mimo-gestuels avant ces répliques, le verbe répéter ne peut porter que sur l’insulte. Ce verbe est employé à l’impératif « Répète », mais implicitement, au plan des actes de langage, il est investi d’une valeur illocutoire indirecte, celle de la menace ; et c’est, d’ailleurs, ainsi qu’il est censé être interprété par l’allocutaire. En effet, Kerbrat-Orecchioni, dans son ouvrage, L’implicite[52], remarque que l’ensemble des valeurs illocutoires se décompose en valeurs illocutoires primitives qui se distinguent des valeurs illocutoires dérivées. Elle précise que les marqueurs des valeurs illocutoires explicites sont les expressions performatives et les formes de phrase. Elle donne l’exemple suivant pour illustrer son point de vue :

Vous irez à Tombouctou

Dans cet énoncé, elle relève :

– un contenu explicite : une assertion,
– des contenus implicites : une promesse, une louange, ou
– une menace.

A la lumière de ces précisions, l’énoncé : « Répète un peu voir », ainsi que le ton sur lequel il est proféré marqué par un tutoiement familier, acquiert dans le contexte une valeur illocutoire dérivée de menace. Le contenu implicite qui lui correspond serait : “as-tu le courage de me redire ton insulte ?“. Cette intransitivité fait partie, en réalité, de la cohérence du discours, c'est-à-dire qu’elle se comprend à travers le contexte. La cohérence renvoie, selon Moeshler et Reboul, « aux propriétés du texte du discours qui assurent son interprétabilité »[53].

Les relations entre les différents énoncés ne sont pas systématiquement explicites. Elles peuvent être récupérées « par inférence, soit par une prémisse implicitée, soit par une hypothèse contextuelle, soit encore par un schéma d’actions standardisés (script, plan ou scénario) »[54] . Ce dernier genre d’inférence se constitue naturellement chez tous les usagers du langage et fait partie selon Kerbrat-Orecchioni des « inférences praxéologiques », c'est-à-dire « les informations présupposées ou sous-entendues par l’énoncé de tel ou tel fait diégétique, qui au nom d’une certaine “logique des actions“ (lesquelles s’organisent en “scripts“, “frames “, “ macrostructures“ et autres praxéogrammes) implique nécessairement ou éventuellement la réalisations d’autres actions nécessairement ou éventuellement corrélées. » Elle donne l’exemple de l’énoncé « verse-moi de l’eau » qui « est généralement interprété comme “ dans mon verre“ que “ sur la tête“ »[55].

Umberto Eco a recours à la notion de scénario même pour analyser de simples lexèmes. Il analyse le scénario du mot supermarché comme suit :

« Le scénario “supermarché“ comportera la notion d’un endroit où les gens entrent pour acheter diverses marchandises, les prennent directement sans l’intermédiaire de vendeurs et les payent ensuite à la caisse. Un bon scénario de ce type devrait probablement considérer aussi les marchandises vendues dans un supermarché (par exemple : des brosses oui, des automobiles non). »[56]

On voit donc la récurrence du concept de script dans les analyses énonciatives. Ceci montre l’aspect prévisible inhérent à ce genre d’inférence. Le petit type fait ici semblant de ne pas comprendre l’intention de Gabriel. La mauvaise foi peut donc être une stratégie qui consiste à ne pas décoder les contenus du discours, compte tenu des finalités du locuteur, que l’on perçoit, toutefois, afin d’échapper à des situations délicates où le conflit verbal risque de se transformer en conflit physique[57]. C’est ce que montre Kerbrat-Orecchioni dans Les Interactions verbales en proposant une liste des différentes façons avec lesquelles se terminent les dialogues « agonaux » c'est-à-dire conflictuels. L’un des scénarios envisagés est :

« La guerre verbale dégénère en un affrontement corporel, qui peut à la limite entrainer la mort, non plus de l’interaction, mais de l’un ou de l’autre des interactants. »[58]

1.2.2. Des déictiques ambigus

La mauvaise foi peut également se manifester à travers la manipulation des déictiques. Ce terme désigne, en linguistique, des séquences du discours dont le référent ne peut être décodé que dans le contexte énonciatif. Tel est le cas par exemple des pronoms de la première et deuxième personne, des adverbes comme demain, ici, maintenant et de certains temps verbaux qui servent à indiquer des temporalités en prenant pour repère le présent de l’énonciation. Ce concept figure dans la terminologie de Otto Jepersen, sous l’étiquette de shifter ou embrayeur.

Les linguistes distinguent généralement deux grands types de référence, c'est-à-dire deux modes en vertu desquels les énoncés renvoient à la réalité non linguistique :

- la référence absolue : la référence à la réalité se fait sans aucune connaissance obligatoire d’éléments circonstanciels ;
- la référence relative : l’interprétation des énoncés ne peut se faire qu’à travers la connaissance du contexte énonciatif.
Les déictiques font partie de cette deuxième catégorie.
«- On est bientôt arrivés, dit Gabriel conciliant. Voilà le tabac du coin.
- De quel coin ? demanda Charles ironiquement.
- Du coin de la rue de chez moi où j’habite, répond Gabriel avec candeur. » (p.16)

Charles fait semblant de ne pas savoir interpréter la signification du groupe prépositionnel « du coin ».

Le substantif « coin » est généralement utilisé pour signifier un espace qui se trouve à l’intersection de deux rues et lorsqu’il est précédé d’un article indéfini contracté « du », il indique un lieu très proche de l’endroit où l’on est; Tandis que les interlocuteurs, Charles et Gabriel, ne sont pas dans un lieu stable mais en mouvement : ils sont en route dans le taxi. C’est pour cette raison contextuelle que Charles montre à son allocutaire, en posant la question : « de quel coin ? », que son indication spatiale est incomplète dans le contexte énonciatif dans lequel ils s’inscrivent.

Gabriel, croyant à la sincérité de Charles, ajoute un complément au nom « coin » afin de mieux se faire comprendre : « de la rue de chez moi où j’habite ». Nous avons ici un regard ironique sur les difficultés d’emploi et d’analyse des déictiques :

«le maniement des déictiques donne lieu fréquemment, ainsi qu’on le constate en observant la conversation spontanée, les dégradation pathologiques du comportement discursif, ou leur exploitation à des fins ludiques, à divers types de lapsus, confusions ou inadéquations d’emploi.»[59]

C’est ici un problème lié à l’une des caractéristiques fondamentales de la parole : elle est égocentrique. Ce terme est employé par John Lyons qui dans son ouvrage Sémantique linguistique, note que

« la situation d’énonciation canonique est égocentrique en ce sens que le locuteur, en tant que locuteur, s’attribue le rôle d’égo et relie tout à son propre point de vue […] L’égocentricité est temporelle aussi bien que spatiale puisque le rôle du locuteur est transféré d’un participant à l’autre au fur et à mesure que se déroule la conversation et que les participants peuvent se déplacer en même temps qu’ils parlent. »[60]

L’interprétation ludique des déictiques apparait dans le cas du décodage d’un autre énoncé dans lequel se pose le problème de la distinction de la valeur déictique ou anaphorique du démonstratif « cette »:

«-De rien, dit Gabriel. Et pour revenir à cette soupe à l’oignon, il faut reconnaitre que c’est une invention bien remarquable.

-Celle-ci, demanda Gridoux, […] en particulier ou la soupe à l’oignon en général ?

-En général, répondit Gabriel avec décision. » (p176)

Dans la première réplique de Gabriel, l’adjectif démonstratif féminin « cette » peut s’interpréter comme un déictique désignant « la soupe à l’oignon » que les personnages sont en train de déguster dans le restaurant, inscrits ensemble dans l’ici et le maintenant de l’énonciation, soit comme un terme anaphorique qui reprend « la soupe à l’oignon » dans son acception générique. La réflexion de Gridoux, qui demande une précision portant sur le référent du démonstratif : « particulier » ou « général », est d’ordre métalinguistique et trahit une ambiguïté relative au caractère ambivalent de l’adjectif démonstratif « cette ».

Moeschler et Reboul ont montré comment le processus de l’inférence est complémentaire avec le code linguistique dans le cadre de l’interprétation. En effet, l’opération qui consiste à déterminer les référents est essentielle pour le décodage des contenus des discours :

«De même que le locuteur construit et évalue des hypothèses sur la forme propositionnelle de l’énoncé, de même il construit et évalue des hypothèses sur le référent. Ces hypothèses sont bâties à partir de la signification descriptive ou procédurale de l’expression référentielle et à partir du contexte. »[61]

1.2.3. L'interprétation littérale des expressions figées

Un autre type de mauvaise foi est basé sur l’interprétation littérale d’expressions figées. Nous en avons une illustration dans cette occurrence :

« -…je ne vous demande pas l’heure qu’il est. (Zazie)

- Seize heure quinze, dit la bourgeoise. » (p.100)

L’expression « Je ne vous demande pas l’heure qu’il est » signifie, selon le Dictionnaire des Expressions et Locutions [62] : « je ne vous adresse pas la parole, mêlez-vous de ce qui vous regarde. » Le dictionnaire précise que l’origine de l’expression vient du fait que « demander l’heure à quelqu’un est l’une des manières à la fois les plus anodines et les plus courantes de chercher à entrer en contact avec lui (fonction phatique) ». La mauvaise foi interprétative est une stratégie de la bourgeoise consistant à donner l’heure pour contrer l’exclusion à laquelle l’a soumise Zazie. Tout se passe comme si elle avait compris que Zazie lui demandait vraiment l’heure. C’est encore une fois l’interprétation du sens compositionnel d’une expression figée qui se substitue au sens opaque.

Dans un autre exemple, c’est l’interprétation de la locution adverbiale familière « au fond » qui déclenche une mauvaise foi ironique :

« - Après tout, ce que j’en dis, moi je m’en fous.

- Et moi donc, dit Gabriel, au fond.

-Vous avez un fond, vous ? » (p.43)

Gridoux fait semblant d’interpréter la locution « au fond » qui signifie : en réalité, en employant la signification littérale du mot Fond, dont le sens métaphorique est « ce qui est considéré comme l’élément véritable, au-delà des apparences de l’aspect sensible, en parlant des sentiments et de la réalité intellectuelle »[63] . La mauvaise foi résulte ici de l’écart que le locuteur fait avec la caractéristique de « non actualisation des éléments » d’une expression ou une locution. Pour Gaston Gross, « on peut parler de suite composée quand aucun des éléments lexicaux constitutifs ne peut être actualisé. »[64], c'est-à-dire quand toute l’expression constitue un seul élément lexical.

Avec ce contre-sens formulé dans une interrogation sur un élément qui était présupposé (lorsque je dis au fond, cela présuppose que j’ai un fond), il fait allusion sur le ton de l’ironie à l’aspect superficiel et à la bêtise de son interlocuteur.

Après Zazie, l’expression figée « faire un dessin à quelqu’un » est une fois encore comprise dans son sens transparent par d’autres allocutaires, en l’occurrence, les touristes :

« -Bien sûr, hurla Gabriel, veux-tu que je te fasse un dessin ?

La foule intéressée approuva. Quelques uns applaudirent. » (p.92)

Cette ambiguïté tient au fait qu’un destinataire non natif de la langue ne peut immédiatement repérer le sens d’une expression figée, qui est opaque. Il lui faut une connaissance parfaite de la langue ou des éléments contextuels pour être en mesure d’interpréter correctement le sens stéréotypé. Mais la non-conformité entre le sens codé et le sens interprété par l’interlocuteur est un procédé qui trahit le point de vue du narrateur et, au-delà, de l’auteur quant à l’attitude des touristes, qui déambulent à travers les différentes artères de la ville de Paris, comme les moutons de Panurge, sans réflexion, sans intelligence pour décoder les contenus implicites et sans personnalité. Tout le roman ne cessera, en effet, de critiquer leur superficialité.

1.2.4. Ambigüité de l’homophonie et de l’homonymie

«- Pourquoi ? demanda Zazie. C’est un hormo ?

- Tu veux dire un normal, rectifia Fédor Balanovitch » (p. 122)

Dans la séquence « c’est un hormo ? », l’article indéfini « un » combiné avec l’abréviation de l’expression erronée du terme homosexuel: «Hormosessuel », « hormo » donne une homophonie avec « normaux ». En effet, la consonne n qui clôt l’article indéfini suivie du h aspiré de « hormo » produit un son qui est identique à « un normaux ». Le locuteur fait semblant d’interpréter ceci : mon interlocutrice a commis une faute d’accord en combinant un déterminant singulier “ un“ avec un substantif au pluriel « normaux ». Il fait en quelque sorte une hypercorrection humoristique dans laquelle est connoté axiologiquement l’aspect transgressif de l’homosexualité : normal/anormal.

C’est l’homonymie entre deux termes qui permet à Fédor Balanovitch, dans un autre contexte, d’éviter de commander une boisson :

[...]


[1] - Kerbrat-Orecchioni Catherine (1986): L’implicite, Paris, Armand Colin, p.21

[2] - Ibid

[3] - op.cit, p.161

[4] - Queneau Raymond (1959) : Zazie dans le métro, Paris, Gallimard

[5] - op.cit, p.39

[6] - Ibid

[7] - Queneau Raymond (1950) : Bâtons, chiffres et lettres, Paris, Gallimard

[8] - Kerbrat-Orecchioni Catherine (1990) : Les Interactions verbales, Tome I , Paris, Armand Colin, p.40

[9] - Fuchs Catherine (1996) : Les ambiguïtés du français, Ophrys, Paris

[10] - Cette abréviation d’Ouvroir de littérature potentielle désigne le mouvement littéraire dont Queneau fut le co-fondateur en 1960 avec le mathématicien François Le Lionnais, un an après la parution de Zazie dans le métro et dont l’intention est d’utiliser l’arithmétique et l’algèbre pour expérimenter une nouvelle écriture littéraire. Le surréalisme et l’OuLiPo, par la nature expérimentale de leurs projets, sont deux mouvements très proches. C’est ce que constate Yves Stalloni (2006) : Dictionnaire du roman, Paris, Armand Colin, dans un article consacré au surréalisme : « l’OuLiPo […] parait prolonger, d’une manière originale, l’entreprise surréaliste. » p.263

[11] - Dans un entretien avec George Ribemond-Dessaignes, à propos du rapport de son roman Odile, paru en 1937, avec l’esthétique surréaliste, il déclare :

« “Odile“ […] manifeste un refus total de toute l’atmosphère surréaliste. Maintenant je reconnais l’importance du surréalisme, pour les autres comme pour moi-même, l’importance de son influence, tant en profondeur qu’en étendue. » in Bâtons, chiffres et lettres, Paris, Gallimard, 1950, p.38

[12] - Eco Umberto (1979) : Lector in Fabula ou la coopération interprétative dans les textes narratifs, Milan, Paris, Grasset

[13] - Benveniste Emile (1974) : Problèmes de Linguistique Générale, Tome II, Paris, Gallimard, p.88

[14] - Adam Jean-Michel (1994) : « Pragmatique linguistique du texte écrit » in Quand interpréter c’est changer : Pragmatique et lecture de la parole, Actes du Congrès International d’Herméneutique à Neufchâtel, Genève, Labor et Fides Editions, p.38

[15] - Sahnoun Mokhtar, L’inférence, Publications de la Faculté des Lettres, des Arts et des Humanités de la Manouba. (à paraitre)

[16] - Chauviré Christiane (1995) : Peirce et la signification : introduction à la logique du vague, Coll. Philosophie d’aujourd’hui, Paris, PUF, p.74

[17] - Searle John (1969) : Les actes de langage, Paris, Hermann

[18] - Armengaud François (1985) : La Pragmatique, Coll. Que sais-je ?, Paris, PUF, p.36

[19] - Jayez Jacques (1988) : L’inférence en langue naturelle : Le problème des connecteurs Représentation et calcul, Hermès, p.15

[20] - Bracops Martine (2006) : Introduction à la pragmatique, Bruxelles, De Boeck, p.14

[21] - Kerbrat-Orecchioni Catherine (1986): L’implicite, Paris, Armand Colin

[22] - Kerbrat-Orecchioni Catherine (1977) : La Connotation, Lyon, Presses Universitaires de Lyon

[23] - Kerbrat-Orecchioni Catherine (1990) : Les Interactions verbales, Paris, Armand Colin

[24] - op.cit , Tome I, p.25

[25] - Ducrot Oswald (1973) : La preuve et le dire, Maison Mame

[26] - Rey-Debove Josette (1978) : Le Métalangage: étude linguistique du discours sur langage, Paris, Armand Colin

[27] - Eco Umberto (1979) : Lector in Fabula ou la coopération interprétative dans les textes narratifs, Milan, Paris, Grasset, p.7

[28] - Maingueneau Dominique (1998) : Analyser les textes de communication, Paris, Dunod, p.40

[29] - Queneau Raymond (1933) : Le Chiendent, Paris, Gallimard

[30] - Queneau Raymond (1934) : Gueule de pierre, Paris, Gallimard

[31] - Queneau Raymond (1943) : Pierrot mon ami, Paris, Gallimard

[32] - Queneau Raymond (1947) : Exercices de style, Paris, Gallimard

[33] - Queneau Raymond (1965) : Les Fleurs bleues, Paris, Gallimard

[34] - Le Nouveau Petit Robert (2009) : Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, Version électronique 3.2, Sous la direction D’Alain Rey et Josette Rey-Debove

[35] - Marin Louis (1978) : Le récit est un piège, Paris, Minuit, Coll. Critique, p.8

[36] - Kerbrat-Orecchioni Catherine (1986): L’implicite, Paris, Armand Colin, , p.33

[37] - M.Riegel, J.C Pellat, R.Rioul (1994) : Grammaire Méthodique du Français, Paris, PUF, p.197

[38] - Fontanier Pierre (1968) : Les Figures du discours, Paris, Flammarion

[39] - Queneau Raymond (1933) : Le Chiendent, Paris, Gallimard, p.17

[40] - Barthes Roland (1964) : « Zazie et la littérature » in Essais Critiques, Paris, Seuil, p.130

[41] - Grand Larousse de la Langue Française (1972) : dir. Louis Guilbert, René Lagane, George Niobey, Paris, Larousse, Article sur La dissémination .

[42] - Dupriez Bernard (1984) : Gradus : Les procédés littéraires, Paris, 10/18

1- Martin Robert (1976) : Inférence, antonymie et paraphrase, éléments pour une théorie sémantique, Paris, Librairie C. Klincksieck. p. 54.

[44] - Dictionnaire Historique de la Langue Française (1993) : Sous la direction d’Alain Rey, Paris, Le Robert

[45] - Gross Gaston (1996) : Les expressions figées en français, Paris, Éditions Ophrys.

[46] - op.cit, p.11

[47] - Ducrot Oswald (1972) : Dire et ne pas dire, Coll. Savoir, Paris, Hermann, p.8

[48] - Charaudeau Patrick, Maingueneau Dominique (2002) : Dictionnaire d’Analyse de Discours, Paris Seuil

[49] - Queneau Raymond (1933) : Le Chiendent, Paris, Gallimard, p.15

[50] - op.cit, p.63

[51] - “La valence “est, selon le Nouveau Dictionnaire des Sciences du Langage, Oswald Ducrot et Jean-Marie Schaeffer (1995) : Paris, Seuil, un terme introduit au domaine de la linguistique par Tesnière et emprunté à la physique. « La valence d’un atome est le nombre d’atomes d’hydrogène auxquels il doit être uni pour constituer avec eux un composé stable. Par analogie, la valence d’un verbe est le nombre de compléments à lui donner pour construire un énoncé simple et complet. Ces compléments sont les actants du verbe, dits quelquefois compléments verbaux. »

[52] - Kerbrat-Orecchioni Catherine (1986): L’implicite, Paris, Armand Colin

[53] - Moeschler Jacques, Reboul Anne (1994) : Dictionnaire Encyclopédique de Pragmatique, Paris, Seuil, p.463

[54] - Ibid

[55] - Kerbrat-Orecchioni Catherine (1986): L’implicite, Paris, Armand Colin, p.189

[56] - Eco Umberto (1979) : Lector in Fabula ou la coopération interprétative dans les textes narratifs, Milan, Paris, Grasset, p.104

[57] - Nous pouvons évoquer le point de vue structuraliste sur cette question de prévisibilité communicationnelle, à travers cette citation d’A.J Greimas (1986) : Sémantique Structurale : formes sémiotiques, Paris, PUF, p.260 :

« […] le monde humain et naturel qui entoure le locuteur, et qui sert de cadre très général à l’intérieur duquel se réalisent les événements-messages est relativement stable. La liberté de la communication est donc limitée par l’habitude, qui sur le plan linguistique, s’exprime par la répétition. Aux situations données et qui se répètent correspondent des messages identiques ou comparables. »

[58] - Kerbrat-Orecchioni Catherine (1990) : Les Interactions verbales, Tome II , Paris, Armand Colin, p.147

[59] - Kerbrat-Orecchioni Catherine (1980) : L’énonciation : de la subjectivité dans le langage, Paris, Armand Colin, p.66

[60] - Lyons John (1978) : Sémantique linguistique, Trad. Jacques Durand et Dominique Boulonnais, Paris, Larousse, p.262

[61] - Moeschler Jacques, Reboul Anne (1994) : Dictionnaire Encyclopédique de Pragmatique, Paris, Seuil, p.126

[62] -Rey Alain, Chantreau Sophie (1991) : Dictionnaire des Expressions et Locutions Coll. Les usuels du Robert, Paris, Le robert

[63] - Ibid

[64] - Gross Gaston (1996) : Les expressions figées en français, Paris, Éditions Ophrys, p.13

Fin de l'extrait de 111 pages

Résumé des informations

Titre
L'interprétation des contenu implicites dans "Zazie dans le métro" de R. Queneau
Sous-titre
Approche inférentielle
Université
Faculté des Lettres, des Arts et des Humanités de la Manouba
Auteur
Année
2010
Pages
111
N° de catalogue
V159660
ISBN (ebook)
9783640730346
ISBN (Livre)
9783640730551
Taille d'un fichier
948 KB
Langue
français
Mots clés
Queneau, pragmatique, implicite, polyphonie, métalangage
Citation du texte
Aymen Gharbi (Auteur), 2010, L'interprétation des contenu implicites dans "Zazie dans le métro" de R. Queneau, Munich, GRIN Verlag, https://www.grin.com/document/159660

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