"Ubu roi", la langue

Provocation et distorsion de la langue. Parodie, comique et violence dans "Ubu roi"


Dossier / Travail, 2007

19 Pages


Extrait


Sommaire

1. Introduction

2. Le Père Ubu
2.1 L’histoire du personnage du Père Ubu
2.2 Le personnage du Père Ubu
2.3 La signification d’ Ubu pour l’auteur
2.4 La signification d’Ubu roi pour le théâtre

3. La langue
3.1 La provocation
3.2 Merdre
3.3 Physique
3.4 Phynance
3.5 La chandelle verte
3.6 La distorsion de la langue
3.7 Les néologismes

4. Le comique
4.1 Les jeux de mots
Après la lutte avec l’ours, la MÈRE UBU dit : il me mord, et le PÈRE UBU répond : il est mort (V, 1).
4.2 Les jeux de contraste
4.3 La Parodie / Allusion littéraire
4.4 Le comique visuel
4.5 Le comique de situation
4.6 La violence/ La grossièreté

5. Conclusion

6. Bibliographie

Alfred Jarry

Ubu roi

Provocation et distorsion de la langue

Parodie, comique et violence dans

Ubu roi

1. Introduction

Le sujet de l’exposé est la langue utilisé par Alfred Jarry dans la pièce Ubu roi, la façon avec laquelle il traite la langue, les mots-clés de la pièce, qu’on ne peut pas ne pas remarquer en lisant ou regardant la pièce. On va voir pourquoi il a choisi tel ou tel mot et pourquoi sous cette forme. Jarry ne s’est pas contenté d’utiliser la langue française comme elle se présente à nous. Il l’a déformée, il a créé des néologismes et des composés de formes aberrantes. Dans cet exposé, on va voir ces créations et les raisons pour lesquelles il les a choisies.

Sans préfigurer tous les aspects, on peut déjà ici remarquer que la langue d’ Ubu roi est une langue pleine de grossièreté et de violence, mais il y a aussi des aspects de comique qu’on ne va pas laisser à l’écart.

En se demandant si la langue dans la pièce Ubu roi est une langue sexuelle ou une langue aux allusions sexuelles, on trouve deux sources complètement contradictoires. Le Dictionnaire des Littératures de langue française nous met sur la voie que la pièce fourmille des allusions sexuelles :

Quand on procède à la lecture érotique – (…) – on constate que les mots déformés ou néologiques perdent leur caractère de blocs illisibles : ils se disposent au contraire, de façon aussi cohérente que possible, sur la ligne du contenu sexuel. Ainsi les « Palotins », dont la désignation repose sur la paronymie « pal-phalle ». Quant aux noms qui leur sont attribués – « Giron, Pile, Cotice » -, ils sont empruntés au lexique de l’héraldique, constamment sexualisé chez Jarry.[1]

De l’autre côté, Charles Chassé, un ancien condisciple de Jarry, se mêle de la discussion concernant la genèse de la pièce, c’est-à-dire qu’il se demande si Jarry est le vrai auteur d’ Ubu roi, ou si ce sont plutôt les frères Morin. Pour nous donner la preuve que Jarry ne peut pas être l’auteur, il nous explique :

Quant à chercher des origines d’ordre sexuel à tous ces termes, ce serait une grave erreur pour les exégètes. Ce qui prouve bien, à mon avis, que Jarry n’est pas l’auteur d’ Ubu roi, c’est qu’il n’y a absolument rien de sexuel dans l’œuvre, tandis que la sexualité éclate dans tous les ouvrages authentiques de Jarry qui, tout enfant, était déjà hanté par des préoccupations de cette nature. Ubu roi est purement scatologique. « C’est – me déclarait Morin – la pièce la plus chaste in the world. C’est sale et ce n’est même pas paillard. »[2]

On peut voir, si on veut, quelques allusions sexuelles, on peut déclarer quelques objets phalliques, mais les personnages de la pièce n’affichent aucun intérêt sexuel. La pièce est plutôt scatologique et pour cette raison, l’aspect sexuel a été laissé complètement à l’écart.

2. Le Père Ubu

2.1 L’histoire du personnage du Père Ubu

Le Père Ubu comme personnage n’est pas sorti directement de l’esprit d’Alfred Jarry. Il a pour modèle un professeur du lycée de Rennes, Félix-Frédéric Hébert, professeur de physique, qui était vraiment chahuté de ses élèves. Ils avaient déformé son nom propre en P. H., Père Heb, Eb, Ebé, Ébon, Ébance ou Ébouille.[3]

Avant l’arrivée de Jarry à Rennes, les élèves et surtout les frères Henry et Charles Morin se sont déjà bien moqués de lui et ont écrit Les Polonais, une pièce dans laquelle ils relatent les aventures du « Père Ébé » qui est devenu roi de Pologne, « c’est-à-dire dire Nulle part ». Alfred Jarry et son condisciple Henry Morin, le frère cadet des Morin, sont vite devenus amis et Jarry a utilisé le modèle des Polonais pour créer le personnage du Père Ubu, notamment d’abord Ubu roi.

La pièce Les Polonais fut présentée avec des marionnettes et comme théâtre d’ombres plusieurs fois chez les Jarry et les Morin vers 1888.

2.2 Le personnage du Père Ubu

On a vu plus haut l’origine du Père Ubu. Mais en s’interrogeant sur la signification du personnage d’Ubu, on constate que Jarry lui – même a averti le lecteur de toute interprétation limitative. En même temps, il donnait quand même de façon indirecte quelques indications qui permettent quelques suppositions. L’ Histoire littéraire de la France nous donne une interprétation :

Ubu peut apparaître comme la concrétion sous forme de personnage dramatique de toutes les notions, qui, dans l’univers imaginaire de l’auteur, sont considérées comme repoussantes ou plus précisément négatives – et, par un retournement attendu, exaltantes et positives. Cité par Jarry lui – même : (ce sont) la Physique, la Phynance et la Merdre, qui sont toujours parallèles dans l’esprit d’Ubu.[4]

2.3 La signification d’ Ubu pour l’auteur

D’après le Dictionnaire des œuvres littéraires de langue française c’est

le seul nom d’Ubu (qui) a fait davantage pour rendre célèbre Alfred Jarry que tout l’ensemble de son œuvre, et le personnage a depuis longtemps acquis une existence autonome, dépassant le champ de la littérature. Son origine et l’usage qu’en fit Jarry ne sauraient d’ailleurs en aucun cas être réduits à la dimension littéraire, dont il est aussi la négation et la parodie.[5]

Alfred Jarry était si inspiré par le personnage du Père Ubu qu’il a créé le cercle ubuesque incluant Ubu roi (1896), Ubu cocu (1897), Ubu enchaîné (1899), deux Almanachs du Père Ubu et Ubu sur la butte, réduction en deux actes d’ Ubu roi. Mais le Père Ubu apparaît aussi dans d’autres pièces de Jarry, par exemple dans Les Minutes de sable mémorial, César antéchrist et dans L’Amour en visites.

L’identification d’Alfred Jarry avec son personnage a augmentée de plus en plus jusqu’à la fin de sa vie courte, où il ira même jusqu’à signer « Ubu ».

2.4 La signification d’Ubu roi pour le théâtre

En ce qui concerne la signification d’Ubu roi pour le théâtre, c’est encore le Dictionnaire des œuvres littéraires de langue française, qui nous donne les informations suivantes :

Sur un autre plan, la création d’ Ubu roi est d’une importance essentielle : c’est une date dans l’histoire du théâtre. Les indications de mise en scène suggérées par Jarry et adoptées par Lugné-Poe, directeur du théâtre de l’Œuvre, radicalisaient les recherches théâtrales en cette fin du XIXe siècle.[6]

Alfred Jarry est considéré comme précurseur pour le « Théâtre de l’Absurde »

3. La langue

Si la pièce Ubu roi peut être considérée comme véritablement révolutionnaire, c’est en grande partie parce que la langue utilisée est radicalement neuve, constamment provocante, dérangeante et littéralement inouïe. Ce sont, entre autres, les romans de Rabelais, qui servent comme modèles pour la langue vulgaire et grotesque de cette pièce.

3.1 La provocation

La langue d’Ubu est provocante, choquante et très souvent troublante. Il y a trois mots, qui sont toujours parallèles dans l’esprit d’Ubu et que l’on peut considérer comme des mots-clés de la pièce, les mots qui nous donnent la compréhension de la pièce, le personnage et le message. Ce sont les mots suivants : La Merdre, la Physique et la Phynance. Deux de ces mots subissent visiblement une altération.

3.2 Merdre

Le mot « Merdre » est le mot inaugural d’ Ubu roi. Il ouvre la pièce sans même l’ombre d’une justification dramatique ou psychologique. Rien ne s’est passé avant, rien ne justifie ce juron.

Et à qui s’adresse Jarry, à la Mère Ubu ou au public ? Et qu’est-ce qu’il désirait avec l’usage de ce mot ? Voulait – il provoquer un scandale ? Oui, ça c’est sûr, et, comme le prouvent les démêlés de Jarry avec la censure théâtrale, il a bien réussi sur ce point. Pourquoi alors « Merdre », comme le simple merde, aussi rarement utilisé à cette époque sur une scène, eût été aussi efficace – plus peut-être, car on a pu analyser l’ « r » intercalaire comme indice d’euphémisation.

[...]


[1] Jean-Pierre de Beaumarchais, Daniel Couty, Alain Rey, Dictionnaire des Littératures de langue française, Paris, Bordas, 1984 p. 1111.

[2] Charles Chassé, le vocabulaire de Jarry dans « Ubu Roi ». Ds : CAI (mai ’59) p. 365.

[3] Jean-Pierre de Beaumarchais, Daniel Couty, Alain Rey, Dictionnaire des Littératures de langue française, Paris, Bordas, 1984 p. 1108.

[4] Pierre Abrahan, Roland Desné et al., Histoire littéraire de la France, Édition Sociales, 1987,

p. 389.

[5] Jean-Pierre de Beaumarchais, Daniel Couty, Dictionnaire des œuvres littéraires de langue française, Paris, Bordas, 1994, p. 1959.

[6] Jean-Pierre de Beaumarchais, Daniel Couty, Dictionnaire des œuvres littéraires de langue française, Paris, Bordas, 1994, p. 1960.

Fin de l'extrait de 19 pages

Résumé des informations

Titre
"Ubu roi", la langue
Sous-titre
Provocation et distorsion de la langue. Parodie, comique et violence dans "Ubu roi"
Auteur
Année
2007
Pages
19
N° de catalogue
V125865
ISBN (ebook)
9783640313785
ISBN (Livre)
9783640317523
Taille d'un fichier
508 KB
Langue
français
Mots clés
Provocation, Parodie
Citation du texte
Sibylle Heising (Auteur), 2007, "Ubu roi", la langue, Munich, GRIN Verlag, https://www.grin.com/document/125865

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